L’îlot Leader Price, le quartier Pleyel, la ZAC Saulnier… tous ces sites sont promis à des métamorphoses urbaines et polarisent les opposants.
Saint-Denis, samedi 27 mars. Près de 200 manifestants ont protesté contre les projets immobiliers qui poussent autour de la porte de Paris. LP/N.R.
Par Nathalie Revenu
Le 27 mars 2021 à 18h48
« J’veux du soleil pas des tours de treize étages », « du gazon pas du béton ». Les panneaux hissés par les manifestants donnaient le ton ce samedi après midi porte de Paris à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Près de 200 personnes ont répondu à l’appel de ce rassemblement contre les projets « abominables » de réaménagement urbain du quartier.
En ligne de mire, l’îlot Leader Price. À cet emplacement sera édifiée une tour de treize étages, Le Belvédère, au bord du canal Saint-Denis ainsi qu’une résidence étudiante de dix niveaux à l’angle du boulevard Anatole-France et 168 logements en lieu et place du Leader Price.
Martine, du comité citoyen de vigilance dit « manifester contre le mépris ». Elle estime que les JO sont « un prétexte à tous ces projets qui proposent une bétonisation à outrance, des constructions de bureaux alors qu’il aurait mieux valu construire des logements sociaux et installer des services publics. Au lieu de ça, on implante des habitations bien trop chères pour la population locale. Ce sont les Parisiens qui vont arriver ici ». « Nous n’avons pas les moyens de partir », clame à son tour Victoria Chabran. La présidente de l’Union des associations des riverains du Stade de France déplore cette densification qui se paie aussi en terme sanitaire pendant la pandémie « Nous sommes déjà le département le plus impacté en raison de cette densification ».
Le cortège des manifestants fait un crochet par le quartier de jolis pavillons des années 20, situés juste derrière la zone promise à la démolition. « Nous sommes les voisins », grince Véronique de l’association 18 bis qui réunit des riverains de la rue Génin. Au propre comme au figuré, les tours leur feront de l’ombre.
Les habitants s’inquiètent pour l’ensoleillement de sa propriété une fois les immeubles sortis de terre et le cachet de leur quartier. « On a tourné les Ripoux, Michou d’Auber ici. Depardieu s’est assis sur les marches des maisons de la rue Samson », indique Bertrand, propriétaire d’une maison au bord du canal qui y voit « une pure opération spéculative qui s’est faite sans la moindre concertation ».
Recours contre l’échangeur Pleyel
Il note au passage que lors de la consultation du public en févier, plus de 200 avis contre le projet avaient été formulés, « mais la mairie n’en tient pas compte », déplore-t-il.
Il s’interroge aussi sur le fait que l’architecte des bâtiments de France ait accordé des hauteurs d’immeubles deux fois plus importantes qu’à l’accoutumée. Il en convient « le site est très moche. On est d’accord pour en faire quelque chose, construire des logements, par exemple ». Puis il s’empare du mégaphone pour claironner « Hanotin, tes tours infernales on s’en souviendra aux régionales ! ».
Saint-Denis, samedi 27 mars. Première manifestation pour les opposants aux projets immobiliers du secteur de la porte de Paris.LP/N.R.
Aussi remonté, Hamid Ouidi brandit une pancarte sur laquelle on peut lire « Saint-Denis Pleyel, deux écoles, 700 enfants prisonniers d’un échangeur autoroutier ». Le rassemblement a aggloméré tous les opposants aux programmes immobiliers qui poussent dans le secteur. Face au stade de France, les terrains de la ZAC Saulnier qui vont accueillir la future piscine olympique n’échappent pas à la fièvre immobilière avec la création de 500 logements. Les manifestants regrettent que l’on ait créé des immeubles de bureaux pour faire « un effet barrière ».
Le quartier Pleyel va subir lui aussi une profonde métamorphose pour devenir un énorme nœud de circulation traversé par cinq bretelles autoroutières. Actuellement le trafic emprunte la rue Francisque-Poulbot et ce sont « 10 000 à 20 000 véhicules qui y passent tous les jours », précise Hamid Ouidi.
Ce réaménagement va avoir pour conséquence de rapprocher les voies rapides de l’école Anatole-France. « Cela va ramener la pollution dans une école maternelle. C’est l’asphyxie pour nos gamins qui vont se retrouver au milieu d’une sorte de gros rond-point alors qu’on avait demandé un jardin de 2, 2 hectares », fustige le représentant FCPE. Les opposants ont déposé un recours contre cet échangeur polémique qui doit être examiné par le Conseil d’Etat.